Derrière le costume : la solitude du dirigeant
- Alain Christinet
- 18 sept.
- 2 min de lecture
Introduction
On valorise souvent le dirigeant comme un leader visionnaire, fort, inflexible. Pourtant, derrière cette posture idéalisée, beaucoup témoignent d’un profond sentiment d’isolement. Cette solitude, rarement évoquée, entraîne pourtant des répercussions importantes, tant sur l’équilibre personnel des dirigeants que sur la performance collective des organisations.

Pourquoi les dirigeants sont-ils si seuls ?
La fonction de direction place d’emblée dans une position particulière :
Un rôle attendu de force et de certitude : on projette sur eux l’image d’une autorité sans faille.
Une asymétrie relationnelle : à la différence d’autres collaborateurs, ils n’ont pas de pairs au sein de l’entreprise.
Une confidentialité nécessaire : certaines informations stratégiques ne peuvent être partagées, renforçant encore l’isolement.
L’isolement décisionnel
Prendre des décisions engageantes est la responsabilité première du dirigeant. Mais ce pouvoir s’accompagne d’un fardeau :
Décider sans filet, parfois dans l’incertitude.
Assumer des dilemmes moraux, comme annoncer des licenciements ou restructurer un service.
Gérer des crises sans se plaindre, ni vers le haut (par peur de montrer sa fragilité ou ses doutes au Conseil d’administration ou au propriétaire), ni vers le bas (pour ne pas fragiliser les équipes).
Le coût humain du silence
Cette solitude n’est pas sans effets :
Une charge mentale et émotionnelle élevée.
Des risques accrus de stress, d’épuisement, voire de burnout.
Une altération progressive des relations sociales, parfois jusque dans la vie privée.
Selon une enquête internationale menée par Harvard Business Review, près de la moitié des dirigeants affirment se sentir seuls dans leur rôle – et un sur trois estime que cela affecte négativement leur performance.
Le mythe de l’invulnérabilité
Pourquoi est-il si difficile pour un dirigeant de dire « je ne sais pas »» ? Parce que la culture managériale reste imprégnée du culte de l’image et de la performance. Reconnaître sa vulnérabilité est encore perçu comme un risque pour l’autorité, alors qu’il s’agit au contraire d’une forme de lucidité et de maturité.
Briser l’isolement : des pistes concrètes
La solitude du dirigeant n’est pas une fatalité. Plusieurs leviers existent :
Se créer un cercle de confiance : coach, mentor, pairs extérieurs.
Développer une relation de confiance authentique avec le.la président.e du Conseil d’administration
S’ouvrir à des espaces de parole confidentiels : groupes de codéveloppement, réseaux de dirigeants.
Promouvoir un leadership plus authentique et collectif : partager les responsabilités, instaurer une culture du feedback.
Pour l’essentiel
La solitude du dirigeant dit beaucoup de la manière dont nous concevons encore le leadership : autorité, invulnérabilité, performance sans faille. Mais un pouvoir plus humain, capable de s’appuyer sur la confiance et l’authenticité, n’affaiblit pas le dirigeant : il renforce durablement son impact. Faire place à la vulnérabilité, c’est transformer un isolement subi en un leadership partagé et porteur de sens.
Ethical HR